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Une photographe explore la fascination des Japonaises pour le luxe

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AFP
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8 nov. 2005

TOKYO, 8 nov 2005 (AFP) - A l'affût dans les quartiers huppés de Tokyo, où le taux de sacs Vuitton au mètre carré est le plus élevé au monde, la photographe française Chantal Stoman a capté pendant six mois la relation étrange et passionnelle qui existe entre la Japonaise et le luxe.

Vendeurs s'agenouillant devant des clientes devenues reines le temps d'un achat, dames en kimono sortant de chez Gucci, centaines de sacs Chanel arborés avec ostentation sur les trottoirs des quartiers ultrachics de Ginza ou d'Omotesando : le travail de Chantal Stoman va faire l'objet d'un livre en France et d'une exposition, intitulée "A Woman's Obsession" (Une Obsession de femme), en février prochain à Tokyo.

"Il y a évidemment différentes catégories de femmes au Japon", explique Chantal Stoman. "Mais il y a un type de femme qui sort le matin de chez elle habillée des pieds à la tête avec la tenue qu'elle a achetée la veille, pour en acheter une nouvelle pour le lendemain. Elle ne fait quasiment que ça".

Le Japon a toujours été l'Eldorado des maisons de luxe françaises ou italiennes, qui y enregistrent des ventes phénoménales en dépit de prix 25% plus élevés qu'ailleurs.

Découvrant l'archipel en février dernier, Mme Stoman, une photographe de mode travaillant selon les méthodes des reporters, est immédiatement frappée par l'omniprésence du luxe dans les rues de Tokyo et par la consommation continuelle d'articles de marque.

"J'ai eu envie de travailler sur ce sujet à ma manière, sans voyeurisme, sans être critique ni insultant", raconte-t-elle.

"Les Japonais ont souvent l'impression que les Occidentaux se moquent d'eux. Mais je pense qu'ils seront flattés de mon travail. On ne dit pas assez aux Japonais que leurs femmes sont belles, et je crois que dans mes images elles le sont".

Parrainée par Chanel, Chantal Stoman a toutefois eu carte blanche pour photographier aussi toutes les marques concurrentes. Au fil de ses pérégrinations, elle se passionne pour l'étonnant cérémonial de prosternations, de salutations et de petites attentions qui, de tradition dans tous les commerces au Japon, est poussé à la perfection dans les maisons de luxe.

"Ici, la femme qui rentre dans la boutique de luxe ne vient pas pour regarder, mais pour acheter", témoigne-t-elle.

"Une fois à l'intérieur, elle a vraiment la tête d'un enfant qu'on mettrait dans une très bonne pâtisserie, et elle se délecte à l'idée de tout ce qu'elle va dépenser. Ensuite, elle prend son temps. Elle est choyée, protégée, on s'agenouille devant elle pour lui présenter un sac... Elle devient la reine devant ses petites soubrettes".

"Quand elle a finalement acheté ce qu'elle souhaitait, là encore on se prosterne devant elle, la vendeuse l'accompagne à la sortie et ne doit pas la quitter des yeux ni retourner dans la boutique jusqu'à ce qu'elle soit hors de sa vue, même si la rue fait 500 mètres. Au total, un achat prend bien trois quarts d'heure".

Goût poussé pour le raffinement et la féminité, ou idéalisation, chez certaines, de la femme occidentale, les raisons qui motivent l'achat effréné d'articles de luxe européens au Japon sont difficiles à appréhender.

Si, en Occident, c'est plutôt la volonté d'être originale qui dicte le comportement féminin en matière de mode, la femme japonaise semble au contraire rechercher l'uniformité, remarque Chantal Stoman.

"Elles ont envie d'avoir ce que toutes les autres ont", souligne-t-elle : "s'il y a un sac qui marche, vous êtes sûr de le voir dans la journée sur cent femmes en même temps, comme s'il était distribué à la sortie du métro !"

"On se demande parfois d'où ces femmes sortent l'argent. J'ai l'impression que certaines mettent tous leurs moyens dans le luxe", poursuit la photographe, qui a un jour fait remarquer à une cliente d'un magasin Vuitton que le sac qu'elle venait d'acheter valait le prix d'un billet d'avion pour Paris.

"Mais si je partais à Paris sans avoir l'argent pour m'acheter un sac Vuitton là-bas, ça ne servirait à rien", rétorqua la jeune femme.

Par Roland de COURSON

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