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5 juil. 2005
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Madame Martine, première d'atelier, vocation haute couture

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5 juil. 2005


"Madame Martine" Photo : Jean-Pierre Muller
Martine Houdet règne depuis trois ans sur un des deux ateliers "flou" haute couture de la maison Chanel, celui où naissent les robes de rêve, une consécration pour cette première d'atelier dont le métier est de donner une vie tridimensionnelle aux croquis de Karl Lagerfeld.


"Madame Martine" a 56 ans et une passion intacte pour un métier qu'elle a choisi presque "naturellement".

A quelques jours de la présentation de la collection haute couture pour l'automne-hiver 2005/2006, elle explique son métier de première d'un atelier "flou" (ndlr: par opposition au "tailleur" où sont fabriqués les vêtements structurés).

Sa grand-mère, couturière en Seine-et-Marne, est sans doute pour beaucoup dans son orientation. CAP de couture en poche, elle décide très tôt de ne travailler que dans de grandes maisons, "sinon cela n'en valait pas la peine", dit-elle en riant.

Chemise blanche impeccable, trousse à épingle matelassée noire et siglée du double C, longs colliers de perles et lunettes de vue également siglés maison, Martine Houdet raconte son parcours commencé en 1966 chez Pierre Cardin, comme "seconde main débutante".

Martine, qui a gravi rapidement les échelons et a obtenu en 1986 le titre de meilleur ouvrier de France, a toujours aimé travailler le flou, "plus dur à travailler" que les tissus épais. "J'aime tout ce qui est léger, vaporeux". Parmi ses matières préférées, les mousselines, les satins et les crêpes.

Martine quitte Cardin en 1977 et entre un an plus tard chez Dior, à l'époque de Marc Bohan. "Le travail était intéressant mais complètement différent. C'était vraiment de la couture de luxe, du travail et des finitions à la perfection", se souvient-elle.

En 1991, elle suit chez Chanel la première d'atelier avec laquelle elle avait l'habitude de travailler. Nouveau choc en arrivant au 31 rue Cambon. "Ici on ne travaillait que le tulle alors que pas du tout chez Cardin et un peu seulement chez Dior. Je me disais +ce n'est pas possible qu'on fasse des robes en tulle+... Au final oui, c'est possible !"

Consécration dans ce métier, elle dirige depuis trois ans une vingtaine de petites mains auxquels s'ajoutent une dizaine d'intérimaires en période de collections.

Elle attend chaque saison avec impatience les croquis de Karl Lagerfeld. "A chaque fois je me dis +qu'est-ce qu'il va nous faire?+ et à chaque fois c'est un scoop", dit-elle.

Le couturier explique la collection aux premières d'atelier, comment il voit les choses. Ensuite, "j'interprète les croquis, j'établis le patron et je le distribue à une première main qualifiée qui va réaliser la toile (ndlr: tissu écru dans lequel le modèle est d'abord réalisé avant le tissu final)".

La période des collections est "le moment le plus palpitant", dit cette femme qui déteste la routine et aime toujours la haute couture car "il y a un travail de recherche à faire, à chaque fois différent, pour arriver au modèle souhaité par le créateur".

"La haute couture, c'est le summum entre belles matières et belles finitions", résume Martine Houdet.

"On est chanceuse de travailler ici. J'espère que cela va continuer longtemps car il y a de moins en moins de maisons". "Ce serait dommage que tous les métiers de la couture s'en aillent. Il faut les préserver", dit-elle.

Martine Houdet n'a que deux regrets: ne pas avoir travaillé pour Yves Saint Laurent et ne pas avoir connu Coco Chanel. "C'est un mythe, une femme exceptionnelle avec un caractère aussi exceptionnel ! J'aurais aimé l'entendre parler de son vivant. Même me faire réprimander une fois !, dit Martine.

Par Dominique AGEORGES

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