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Joe Biden prêt à revoir la diplomatie internationale de l'ère Trump

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7 nov. 2020

Joe Biden, élu samedi à la Maison Blanche, a promis de restaurer le leadership américain et de rassembler les alliés démocratiques des Etats-Unis, mais sa politique étrangère devra composer avec le monde chamboulé hérité de Donald Trump et ne pourra se contenter d'un simple retour en arrière.


Joe Biden (à droite) avec l'actuel président chinois Xi Jinping, en 2012 à Los Angeles, alors qu'ils étaient tous deux vice-présidents - GETTY IMAGES NORTH AMERICA/AFP/Archives



«La crédibilité et l'influence des Etats-Unis dans le monde ont reculé depuis que le président Barack Obama et moi-même avons quitté le pouvoir», écrivait en début d'année l'ancien vice-président dans la revue Foreign Affairs. Avant de promettre de faire en sorte que «l'Amérique guide à nouveau le monde».

Sur plusieurs sujets, la rupture avec Donald Trump devrait être flagrante.
Joe Biden veut ré-adhérer, dès le premier jour de son mandat, en janvier 2021, à l'accord de Paris sur le climat, dont le président républicain est sorti, puis renouer avec l'Organisation mondiale de la santé, abandonnée en pleine pandémie.
Il propose d'organiser, pendant sa première année à la Maison Blanche, un «sommet des démocraties» pour redorer le blason des Etats-Unis, réaffirmer leur attachement au multilatéralisme, pris d'assaut pendant quatre ans, et se rabibocher avec des alliés occidentaux malmenés par la diplomatie trumpiste.

Confrontation avec la Chine



Pour Célia Belin, du cercle de réflexion Brookings Institution, «il y a un risque» que Joe Biden, 77 ans, «voie le monde tel qu'il était quand il a quitté les affaires et non comme il est aujourd'hui», et soit tenté par un simple «retour à la normale».
«Mais le monde a changé et Trump a changé le jeu sur trop de sujets pour que ce soit possible», dit-elle à l'AFP.

De fait, à gauche, de jeunes conseillers ont fait évoluer la doctrine.
«Globalement, je ne pense pas qu'une politique étrangère de Biden serait une réédition de la politique étrangère de l'époque d'Obama», acquiesce Katrina Mulligan, du Center for American Progress, un institut proche des démocrates. «Cette présidence devra gérer la montée de l'autoritarisme et le fait que la démocratie n'est plus en expansion à travers le monde».

Le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune, prévient d'ailleurs que le Vieux Continent ne devra pas considérer «que la situation sera comme avant l'élection du président Trump». «Certaines tendances de la présidence Trump -- la pression sur l'Union européenne au sujet de sa participation à l'effort de défense, la fermeté sur le commerce et la confrontation avec la Chine -- vont, je pense, se poursuivre d'une manière ou d'une autre», a-t-il dit à des journalistes à Washington.

Styles aux antipodes



Au-delà d'un style aux antipodes et de tactiques différentes, Donald Trump et Joe Biden sont sur la même longueur d'onde sur des sujets-clés.
Le premier, novice en politique, a tenté de «mettre fin aux guerres sans fin» et a commencé, sans grande concertation, à retirer les soldats américains de Syrie, d'Irak et d'Afghanistan.

Le second, qui a été sénateur pendant 36 ans, arriverait avec un bagage chargé, en ayant notamment voté pour la guerre en Irak en 2003. Mais il a reconnu une «erreur» à ce sujet et a fait sa mue à mesure que l'opinion manifestait sa fatigue face à l'interventionnisme militaire.

Il est donc improbable que le démocrate renvoie de gros contingents en Afghanistan -- préférant miser sur des missions contreterroristes des forces spéciales.

Joe Biden, représentant d'une classe dirigeante qui a longtemps espéré que la Chine se démocratiserait à la faveur de son ouverture économique, affiche aussi son évolution sur ce sujet capital, à l'heure où Washington et Pékin semblent s'engager dans une nouvelle Guerre froide.

«Les Etats-Unis doivent être fermes avec la Chine», martèle désormais le démocrate, comme pour parer à la critique de Donald Trump, qui l'accuse d'être «faible» et facilement manipulable.

Bill Burns, un ex-diplomate qui préside l'organisation Carnegie Endowment for International Peace, estime que la gestion de cette compétition stratégique déterminera «le succès ou l'échec de la politique étrangère américaine».

Selon lui, une administration Biden se concentrera davantage sur la création d'un réseau d'alliances en Asie, «non pas pour empêcher la montée en puissance de la Chine, car les Etats-Unis n'en ont pas les moyens, mais pour façonner l'environnement de son émergence».

Reste à savoir si, sur la Chine et le commerce, mais aussi dans le bras de fer nucléaire avec l'Iran ou la Corée du Nord, Joe Biden s'appuiera sur les marges de manoeuvres créées tant bien que mal par le président sortant.

«Ou alors aura-t-il la tentation, comme Trump l'a fait, d'effacer tout ce qu'a réalisé son prédécesseur pour tout recommencer à zéro?», s'interroge Célia Belin. «Il risquerait de rencontrer des partenaires fatigués».

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