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Hermione People & Brands: l’appétit aiguisé du repreneur de Camaïeu, Gap France et Go Sport

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30 août 2021

1.300 points de vente, 5.000 salariés et environ 1,3 milliard d’euros de ventes en année pleine. Dans un univers de la distribution mode en pleine recomposition (avec par exemple le démantèlement de Vivarte), voici les contours joufflus du nouveau groupe français qui enchaîne les acquisitions d’enseignes à relancer.


Samuel Alimi - DR


Après La Grande Récré et 22 unités Galeries Lafayette reprises en affiliation en 2018, Hermione People & Brands a empoché plus de 500 magasins Camaïeu l’an dernier, avant de mettre la main sur le réseau tricolore de l’américain Gap ainsi que la chaîne Go Sport au printemps 2021. Synergies, revitalisation des centres-villes et prochaines acquisitions sont autant de sujets balayés pour FashionNetwork.com par Samuel Alimi, vice-président d’une structure qui ne manque pas d’ambition.

Hermione People & Brands possède une assise certaine. L’entité mise au jour en 2021 n'est autre que la filiale retail du groupe FIB (Financière Immobilière Bordelaise), dirigée par le discret homme d'affaires bordelais Michel Ohayon. Après avoir débuté par la gestion d’un magasin de vêtements dans les années 80, il a constitué au fil des décennies un solide portefeuille dans l'immobilier (commerce, hôtellerie, vignoble) et s’imposerait selon Challenges comme la 144e fortune de France.


Les Galeries Lafayette d'Agen sont gérées depuis trois ans par Hermione People & Brands - DR


Les temps troublés de la crise sanitaire et les difficultés de certains acteurs retail ont multiplié les occasions de rachat (parfois pour un euro seulement), qu’il n’a pas laissé passer. Une offensive assumée. Pas de hasard si le choix de l'appellation Hermione est un clin d’œil au nom de la frégate menée par le marquis de Lafayette dans sa conquête de l’Amérique, et évidemment une allusion aux Galeries du même nom, dont HPB vient tout juste d’acquérir trois autres grands magasins à gérer en affiliation (à Pau, Rosny et Tours).

"Faire tomber les murs" entre les enseignes du groupe



"Notre feuille de route est de créer une plateforme de jolies marques par le biais d’acquisitions, énonce Samuel Alimi, expert logistique et sourcing qui a rejoint la structure il y a un an. Chacune va conserver son ADN propre et une stratégie indépendante, mais nous ne formons pas une armée déconnectée: l’objectif est de bâtir un socle de synergies très fortes quand cela fait sens." Des chantiers vont être lancés "pour faire tomber les murs" sur le front de la data, puisque le portefeuille client des enseignes réunies voisine les 20 millions de personnes, mais aussi côté logistique (avec des entrepôts mutualisés). Sur le plan retail, Camaïeu s’est déjà fait une place en shop-in-shop aux Galeries Lafayette, et l’arrivée de corners Go Sport ou Gap pourrait naturellement suivre.

Ces deux réseaux , Go Sport et Gap France, n’ont pas encore officiellement rejoint le giron d’Hermione People & Brands, leur intégration sera finalisée à l’automne. Un siège commun à toutes ces enseignes n’est pas à l’ordre du jour, puisqu’elles sont disséminées sur le territoire (Roubaix, Grenoble, Paris…), mais toutes ont des équipes basées dans la capitale qui pourraient à terme partager le même bureau.


Collection printemps-été 2021 - Camaïeu


Chez Camaïeu, le chantier le plus avancé est celui de la remise à plat de la supply chain. "En un an, nous sommes passés de 95% de grand import à 60%. Le proche import nous permet d’injecter plus de nouveautés en cours de saison". Avec 512 boutiques, la chaîne d’habillement féminin (passée par la case redressement judiciaire l’an dernier) opère "l’un des maillages les plus forts du territoire". Avec des fermetures prévues pour les magasins déficitaires ? "Camaïeu n’aura pas moins d’adresses à l’avenir, car l’idée est vraiment de conserver une présence de proximité", assure Samuel Alimi, ajoutant que la réflexion porte même sur quelques relocalisations sur de plus grandes surfaces. Malgré une année perturbée par le Covid-19, le cap du retour à l’équilibre en 2022 pour Camaïeu est toujours maintenu.

La volonté de doubler le réseau de Gap



La dynamique à impulser pour Gap - et ses 21 unités reprises dans l’Hexagone - est tout autre. "C’est une belle marque qui est vraiment sous-représentée sur le territoire, puisque présente à 95% en région parisienne. Un développement national aurait du sens. Le réseau pourrait facilement doubler et c’est un objectif auquel on croit beaucoup. On trépigne d’avoir les clés !" Le projet d’un site marchand français est aussi sur la table, puisque Gap opérait en ligne en France mais seulement "via un e-shop européen qui avait plutôt valeur de vitrine".


Dans certains magasins Go Sport, l'espace "Le Club" est dédié à la pratique sportive - Go Sport


La stratégie pour le groupe Go Sport (165 points de vente), qui a sans doute pâti ces dernières années d’un positionnement pas assez marqué par rapport à ses concurrents, n’est pas encore divulguée, mais la pertinence de magasins spécialisés, comme le fait Endurance Shop sur la course à pied, est "une bonne formule qui pourrait pourquoi pas être dupliquée sur d’autres sports".

Le projet des Galeries Lafayette en région s’inscrit lui dans un mouvement plus global de relance des cœurs de ville de province. "Nous avons pour but d’adapter l’offre localement et nous nous sommes donnés pour mission d’aider à la revitalisation des centres-villes". HPB discute aussi avec certaines mairies pour s’installer dans ces localités avec ses cinq marques au positionnement différent, et les aider à retrouver un certain dynamisme commercial.

Encore des envies de croissance



Avoir des points de vente situés à moins d’une vingtaine de kilomètres de chaque Français est un des impératifs du groupe. Ce qui doit servir une volonté d’efficacité omnicanale: "La logistique du dernier kilomètre coûte cher. On peut imaginer à terme qu’un client puisse retirer un produit Gap commandé en ligne dans un magasin Camaïeu proche de son domicile", avance-t-il.


Exemple de corner Camaïeu installé depuis mars dernier aux Galeries Lafayette - Camaïeu


Même si les acquisitions ont été réalisées à peu de frais (un euro symbolique pour Go Sport par exemple), les coûts de fonctionnement d’un groupe de distribution ainsi constitué sont colossaux. Alors, avec quel argent la vaste boutique peut-elle tourner ? "Des fonds propres, une certaine ingénierie financière et une capacité d’auto-finance, répond Samuel Alimi. L’actionnaire investit lourdement dans chacune des entreprises. Il est sûr que ces transformations nécessitent beaucoup d’argent, et il reste du chemin à parcourir, mais ces marques sont toutes de belles endormies qui ont le potentiel de devenir leader de leur secteur."

Et, malgré une taille déjà conséquente et une présence dans le textile, le sport et le jouet, le groupe entend rapidement poursuivre les acquisitions et s’aventurer encore sur d’autres marchés: "la beauté, la lingerie et même l’alimentaire nous intéressent de près", livre le dirigeant, qui plaide pour cette diversification de portefeuille. "HPB cultive un côté entrepreneurial affirmé, on ne se prive pas de répondre lorsque des opportunités se présentent: c’est ça le commerce !" Surtout que l’objectif déjà affiché par le groupe serait de doubler ce parc global de 1.300 points de vente. Une faim de loup.

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