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Clémentine Martin
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24 janv. 2020
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Créativité, co-création et androgynie marquent les tendances du design portugais

Traduit par
Clémentine Martin
Publié le
24 janv. 2020

Les défilés s’enchaînent à un rythme frénétique et les contenus éphémères inondent les réseaux sociaux. Existe-t-il une alternative ? Oui : les amateurs de développement durable et les avocats de la slow-fashion sont progressivement rejoints par des clients fatigués des normes de l’industrie de la mode et friands de nouveaux noms différents, pas encore sous les feux des projecteurs « mainstream ». Tournons les yeux vers le Portugal pour découvrir de nouvelles griffes émergentes et toutes récentes, profitant d’une incroyable liberté grâce à leur manque actuel de notoriété.

Dans l’objectif d’accompagner le développement de sa scène mode, le pays promeut ses jeunes créateurs sous l’étendard commun de ModaLisboa. L’événement a fêté sa 53e édition en octobre dernier. Toutes les marques ont défilé au Campo de Santa Clara, en plein cœur du quartier coloré d’Alfama, dans l’ancien Bureau des Uniformes et de l’Équipement de l’Armée portugaise. Une prise de position forte concernant l’avenir de la mode que souhaitent les Portugais et un excellent lieu où découvrir de nouveaux prodiges.



Le collectif portugais Awaytomars promeut la co-création - Awaytomars


Awaytomars



On ne saurait évoquer la nouvelle scène portugaise sans mentionner Awaytomars, une plateforme de création collaborative fondée en 2014 par le Brésilien Alfredo Orobio. À caractère expérimental, ce projet est né avec une première collection issue de la mise en commun du travail de 46 créateurs au total : « Nous sommes la génération qui a inventé l’idée de consommation de masse. Maintenant, nous devons changer de mentalité », affirme le fondateur d’Awaytomars. C’est ce qui l’a poussé à monter son projet.

Aujourd’hui, la marque compte bien « faire changer l’industrie de la mode à travers l’usage de la technologie ». La stratégie adoptée est celle de la co-création, avec plus de 15 000 participants dans le monde entier. Pour pouvoir collaborer, les utilisateurs doivent s’enregistrer sur une plateforme en ligne. Pendant les phases de présentation, ils peuvent proposer leurs projets. Les différentes idées sont ensuite soumises au vote et à une adaptation postérieure par la communauté. Ensuite, la production de prototypes est lancée, et le collectif de créateurs sera le premier à y avoir accès.

La dernière collection d’Awaytomars se distingue par des dégradés de tons pastel, apposés sur des pièces minimalistes en laine mérinos. Pour cette ligne, la marque portugaise a uni ses forces à celles du spécialiste de la laine The Woolmark Company. Les robes mi-longues (environ 460 euros), les pantalons fluides (320 euros) ou les blazers (670 euros), créés en regroupant le travail de créateurs internationaux comme Mariana Escobar (Brésil), Jason Gibson (Australie), Felipe Rocha (Brésil), Helder Silva (Allemagne), David Cabra (Colombie) et Xi Zhu Zhu (Chine), sont le fruit d’une sélection opérée parmi 200 projets en provenance de 43 pays. Le résultat est distribué sur la boutique en ligne de la firme, mais aussi chez Harvey Nichols et dans plusieurs points de vente physiques à Londres.


Constança Entrudo




Dernier défilé de la collection printemps/été 2020 de Constança Entrudo à ModaLisboa - Constança Entrudo


Les pièces de Constança Entrudo sont aussi irrévérencieuses que visuellement hypnotiques. La créatrice lisboète a obtenu en 2017 son diplôme de stylisme auprès de la prestigieuse école londonienne Central Saint Martins. Malgré son jeune âge, elle a fait des passages chez plusieurs griffes de renom comme Peter Pilotto, son compatriote Marques’Almeida ou Balmain, sous la direction créative d’Olivier Rousteing.

La première collection de Constança Entrudo a été présentée lors de l’édition printemps-été 2018 de ModaLisboa, il y a seulement deux ans. La jeune créatrice a souhaité se lancer en solo afin d’avoir le pouvoir d'explorer librement les possibilités de la mode « sans limite d’âge ou de genre ». Ses vêtements sont fluides et futuristes et sa dernière collection s’intitule « All that is solid melts into air ». Le jaune et le vert fluo contrastent avec des dégradés de lilas ou des blancs opaques. Les pièces sont volontairement effilochées, asymétriques ou trouées. Les jeux de transparence et les visages paraissant mouillés évoquent des cyborgs à l’ère des filtres Instagram. Parmi les mannequins, on trouve le rappeur et militant LGBTI californien Mykki Blanco, vêtu d’une robe arc-en-ciel aux tonalités douces. Peut-être la proposition la plus visuelle et la plus innovante du pays.

Carolina Machado




Carolina Machado a lancé sa firme éponyme en 2017 - Carolina Machado


Âgée d’à peine 26 ans, Carolina Machado peut se vanter d’avoir déjà créé sept collections complètes pour la marque qui porte son nom. L'irrévérence est aussi bien présente, mais les lignes de ses pièces sont plus décontractées que chez certains de ses compatriotes. Cette créatrice de mode féminine imagine des silhouettes sophistiquées et minimalistes dans des tonalités allant chercher du côté de l’argenté et du pastel, dans des matières telles que le Lycra ou le coton léger. Le succès commercial devrait être au rendez-vous, aussi bien au niveau national qu’international. Pour le moment, les pièces de la marque sont en vente sur son propre site web, mais aussi sur des plateformes en ligne comme Minty Square ou Ivalo. En Suède, la marque travaille avec le showroom Patriksson Communication.

Joao Magalhaes




João Magalhães a présenté sa première collection à son nom en mars 2019 - João Magalhães


Le créateur João Magalhães, lui aussi, se place dans le camp des rebelles. Après avoir expérimenté la création d’accessoires dès 2014 avec sa marque Morecco (qui a d’ailleurs fini par proposer un vestiaire complet), le voilà à la tête d’une marque à son nom depuis mars 2019. D’esthétique androgyne et en marge de tous les canons conventionnels, la marque émergente explore de nouveaux concepts à l’aide de matières innovantes et de techniques artisanales comme la broderie à la main. Pour son dernier défilé, où l’on pouvait aussi voir des maillots de bain de la marque Studio Arena, le créateur s’est inspiré de l’essai « Cyborg Manifesto » (1985) pour brouiller les frontières entre l’Homme, la nature et les machines avec des designs faisant la part belle aux transparences, aux volants et aux drapés.

Hibu




Fondée en 2013, la marque Hibu propose des vêtements non genrés - Hibu


« Selon nous, la conception de vêtements ne devrait pas se baser sur le genre », revendique la marque de streetwear minimaliste Hibu. Créée en 2013, cette marque portugaise a présenté sa collection CRU-L au cours d’un défilé mixte. Les mannequins défilaient par deux et s’échangeaient leurs looks devant le public, montrant ainsi que les basiques intemporels de style workwear de la marque s’adaptent aussi bien aux hommes qu’aux femmes. Silhouettes oversize, salopettes de travail en jean, tee-shirts et sweatshirts à effet tye&dye : la collection était émaillée de pièces faciles à ajouter à sa garde-robe. Produites à 100 % au Portugal, les créations sont distribuées via le site internet de la marque avec un positionnement de prix compétitif : jeans à partir de 100 euros, vestes à partir de 170 euros et salopettes démarrant à 235 euros.

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