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Boohoo défend les conditions de travail de son site de Burnley

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24 nov. 2022

Si Boohoo s'est engagé à jouer la transparence depuis les polémiques de 2020, hors de question cependant pour le groupe britannique de ne pas répondre aux accusations qu'il estime montées en épingle. Contactée par FashionNetwork.com, la structure indique entamer une démarche auprès de l'Independent Press Standards Organisation (IPSO) à l'encontre des accusations du Times, contre lesquelles la marque avance des preuves matérielles.


Boohoo



Un article publié mercredi 23 novembre par le Times dénonce les conditions de travail et de rémunération dans un centre logistique de l'entreprise situé à Burnley, dans le nord-est de l'Angleterre. Un lieu où Boohoo nous indique opérer depuis maintenant douze ans, et qui a progressivement pris de l'importance jusqu'à employer quelque 2.500 personnes.

Parmi les points sur lesquels Boohoo entend contre-attaquer figure d'abord la très faible rémunération dont le journaliste infiltré pendant un mois dit avoir fait l'objet. "Quand il m'a appelé, le journaliste m'a dit avoir été payé 10 livres de l'heure. J'ai répondu que c'est impossible", nous indique la directrice corporate affairs du groupe, Cheryl Chung. L'article du Times fera finalement état de 11 livres, contre 9,5 livres pour le salaire minimum légal, et 10,50 livres pour le "living wage" (ou salaire de subsistance).

L'article du Times pointe le rythme parfois dangereux induit par les objectifs fixés par l'entreprise. Sur ce point, Boohoo nous indique que ces objectifs sont établis via études de terrain et régulièrement revus selon les standards du BSI (Institution britannique des standards). Quant aux visites "régulières" d'ambulances relevées par le journaliste sur le site, Boohoo indique qu'elles interviennent au rythme moyen d'une fois par mois, pour des cas incluant des crises d'épilepsie ou malaises vagaux.

Les distances et la chaleur



Toujours sur le plan des conditions de travail, l'entreprise dément formellement la distance de 20 kilomètres que le journaliste dit avoir arpenté en une seule session de travail. Pour Boohoo, l'intéressé a arpenté au maximum 13,3 kilomètres (8,3 miles) en une journée. Donnée basée sur les relevés des dispositifs de poignet remis à chaque employé. Via ces données, Boohoo avance que la distance moyenne par employé serait de 7,3 miles (11,75 km), et cette distance quotidienne descend parfois jusqu'à 3,5 miles (5,6 kilomètres).


Le laboratoire textile inauguré cette année au siège de Boohoo à Manchester - Boohoo



"Que vous commandiez un produit ou un repas, il y a toujours quelqu'un qui doit aller le chercher, à moins que l'on automatise tout et que les gens perdent leurs travail", pour Cheryl Chung. "Ce qui est implicite (dans cet article), c'est que marcher dans un entrepôt est une chose déshumanisante. Ce que je trouve incroyablement insultant pour le travail formidable que font des personnes sans qui notre activité ne pourrait pas tourner".

Un autre point sur lequel Boohoo réagit est la forte chaleur dont a souffert le journaliste durant son passage dans l'entrepôt. L'entreprise rappelle sur ce point qu'elle correspondait au mois d'août le plus chaud jamais relevé dans la région. Des rotations dans les zones les plus fraiches de l'entrepôt auraient dès lors été organisées, tandis que fontaines à eau et bouteilles d'eau fraîche étaient gratuitement mises à disposition, indique le groupe.

Boohoo et la critique de la fast-fashion



A l'instar du chinois Shein, Boohoo et ses marques sœurs (Karen Millen, Nasty Gal, PrettyLittleThing, Coast, MissPap, Oasis, Burton…) concentre sur ses épaules les critiques croissantes à l'encontre de la fast-fashion. Une rythmique rapide du renouvellement de l'offre à laquelle Boohoo apporte cependant une approche spécifique : la production par petites séries (environ 200 pièces) renouvelables.


Boohoo x Kourtney Kardashian Barker - Boohoo


Cette approche vise spécifiquement à écarter les risques de surproduction et de stocks invendus, tout en concentrant le réassort sur les pièces rencontrant le succès. Approche qui a permis à l'entreprise de générer sur son premier semestre (clos fin août) un chiffre d'affaires de 882,4 millions de livres (982,05 millions d’euros), chiffre 50% supérieur à ceux de la même période en 2019.

Dans l'ombre de la polémique Leicester



Rencontrée à Paris en septembre pour le lancement de la collaboration entre Boohoo et Kourtney Kardashian Barker, Cheryl Chung savait qu'un nom viendrait immanquablement dans la conversation: Leicester. Arrivée en mars 2020 à la direction des affaires du groupe, l'ancienne directrice communication de McDonald's UK était arrivée juste à temps pour "jouer les pompiers" tandis que s'embrasaient les polémiques autour de l'activité de la marque dans cette ville du centre de l'Angleterre.

Ainsi, durant l'été 2020, un article du Sunday Times accusait l'entreprise de piétiner le droit des travailleurs sur l'un de ses sites de Leicester. En décembre de la même année, l'entreprise était cette fois accusée de vendre des vêtements fabriqués par des Pakistanais sous-payés. Deux polémiques qui feront les gros titres au niveau national. Boohoo fera tout pour montrer sa transparence, coupant les ponts avec 64 de ses sous-traitants de Leicester, et se trouvant un nouvel auditeur.



La première manufacture propre de Boohoo, lancée au printemps à Leicester - Boohoo


En septembre 2020, l'entreprise publie elle-même les résultats d'un audit indépendant taclant Boohoo pour avoir sciemment fermé les yeux sur certaines pratiques. Dans la foulée, le groupe débauche chez Primark un nouveau responsable du sourcing durable et demande à un juge britannique renommé, Brian Leveson, de lister les améliorations à apporter au sourcing de l'entreprise. En avril 2021, l'entreprise publie de nouveau les résultats d'une enquête indépendante montrant des manquements "clairement inacceptables" chez les fournisseurs.

Symbole d'une image vertueuse que Boohoo cherche à se construire, le projet d'une usine modèle et de laboratoire textile a été lancé en 2020, dans le sillage des polémiques. Le site a finalement ouvert ses portes en avril dernier. Tandis que, côté qualité de l'offre, le groupe a doté son siège de Manchester de son propre laboratoire textile, pour mieux surveiller les matériaux composant ses collections. Les projets sont engagés, mais le travail pour redorer l'image du groupe promet d'être encore long.

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