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Clémentine Martin
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19 déc. 2019
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"Made in Bangladesh" : les femmes à l’origine du progrès social

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Reuters
Traduit par
Clémentine Martin
Publié le
19 déc. 2019

Dans l’industrie textile au Bangladesh, les femmes sont moteurs aussi bien de l’économie que du progrès social. C’est en tout cas ce que semble révéler un nouveau film qui remet en cause les stéréotypes.


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« Made in Bangladesh » revient sur le parcours de Daliya Akter, une travailleuse textile engagée dans la lutte pour les droits des salariés. Elle a d’abord échappé à un mariage forcé avant de rejoindre les rangs des employés d’usine et de prendre ensuite la tête d’un des syndicats dans la capitale, Dhaka.

Grâce à son obstination, Daliya Akter a réussi à obtenir des garanties de salaire pour elle et ses collègues, malgré l’inquiétude de son mari et les menaces de ses supérieurs. Loin des clichés, ce film met en lumière un phénomène peu connu : la révolte des femmes dans un pays particulièrement conservateur. Le Bangladesh est par ailleurs le deuxième exportateur textile au monde.

Les usines textiles, sous-traitantes de marques comme H&M ou Next, emploient pas moins de quatre millions de travailleurs dans le pays. Près de 80 % sont des femmes, qui travaillent de longues heures pour des salaires dérisoires. Et ces femmes sont généralement perçues comme soumises et impuissantes.

« On pense toujours que les travailleurs du textile sont opprimés. Mais pendant la réalisation de ce film, je me suis rendu compte que ces femmes luttent de toutes leurs forces et sont loin d’être démunies », explique le réalisateur Rubaiyat Hossain à la fondation Thomson Reuters lors d’une interview téléphonique : « Il faut… écouter ces travailleurs. C’est grâce à eux que notre économie va mieux et nous devons leur montrer notre reconnaissance. »

Le Bangladesh est aujourd’hui confronté à deux défis majeurs dans le textile : l’amélioration des conditions de travail dans les usines et le respect des droits des travailleurs. Le pays est sous pression depuis l’effondrement du complexe Rana Plaza en 2013, ayant entraîné la mort de 1 136 employés.

Bas salaires



Après cette catastrophe, les contrôles des usines ont été renforcés et des dizaines d’ateliers jugés dangereux ont été fermés. Des réformes ont aussi été apportées au Code du travail. Malgré cela, les salaires restent très bas et le nombre de femmes à la tête des syndicats baisse continuellement.

En salles en France depuis le 4 décembre, le film a été présenté à Paris fin novembre en avant-première. Incarnée par l’actrice Rikita Shimu dans le film, Daliya Akter espère qu’il va encourager les travailleurs du textile à prendre la parole. Il sera projeté au Bangladesh dans le courant de l’année prochaine : « Il existe beaucoup plus de syndicats aujourd’hui qu’en 2013, mais certains travailleurs n’osent toujours pas exprimer leurs préoccupations et ce film va les aider », a-t-elle affirmé.

C’est suite à la fermeture de son usine en 2016, après la perte de plusieurs gros contrats étrangers qu’elle a commencé à travailler avec le réalisateur Rubaiyat Hossain, reconnu dans le monde entier. Comme des milliers d’autres travailleurs en difficulté, elle a quitté le Bangladesh pour rejoindre le Moyen-Orient afin d’y chercher du travail. En 2018, elle est arrivée dans la ville portuaire d’Aqaba, en Jordanie, et a décroché un poste d’opératrice de machine dans une usine de pantalons et de jupes.

Mais quelques mois plus tard, elle est tombée malade et a dû rentrer dans son pays d’origine. Visée par plusieurs procès, Daliya Akter n’a aucune intention d’abandonner le combat pour les droits des travailleurs : « Je ne sais pas combien de temps il me reste à vivre, mais je sais que je lutterai pour les droits des travailleurs jusqu’à mon dernier souffle », assène-t-elle.

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