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29 nov. 2016
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Le vêtement fait scandale au Musée des Arts décoratifs de Paris

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29 nov. 2016

Quel est le point commun entre des poulaines, chaussures moyenâgeuses à pointe, un jean déchiré et la robe à fleurs portée par Cécile Duflot à l'Assemblée nationale ? Ces vêtements ont tous, un jour, choqué ou fait jaser.



A travers quelque 300 pièces, accessoires et objets, l'exposition « Tenue correcte exigée : quand le vêtement fait scandale » qui s'ouvre jeudi au Musée des Arts décoratifs à Paris explore les codes qui régissent la mode en Occident du 14e siècle à nos jours.

Péché originel

Le visiteur est accueilli par un tableau de Cranach représentant Adam et Eve, chassés du paradis et obligés de se couvrir après avoir commis le péché originel : « Pendant des siècles, de l'époque médiévale jusqu'au 18e siècle, tous les lettrés et les moralistes ont rappelé que le vêtement était lié au péché, à la faute. Pour cette raison, le vêtement devait être le plus discret, le plus sobre possible », souligne le commissaire de l'exposition, l'historien Denis Bruna.

Déchiré

La mode du jean lacéré ne date pas d'hier: au 17e siècle, une ordonnance de Louis XIII interdisait déjà les vêtements déchirés. « C'était de belles déchirures ; des artisans spécialisés donnaient des coups de rasoir le long des manches », précise Denis Bruna. Mais la mode choque : déchirer ses vêtements est une forme de gaspillage, c'est aussi un signe de folie, de colère, et de deuil.

Dress code politique

Alors ministre du Logement, Cécile Duflot s'était attirée des sifflets de certains députés d'opposition en 2012. L'objet de cet émoi ? Une robe à fleurs, blanche et bleu marine, jugée « un peu trop féminine dans un milieu assez conservateur et sexiste », explique le commissaire d'exposition.

A côté de cette robe boutonnée est présenté un costume de Jack Lang, signé Thierry Mugler, dont la veste à col Mao, ne laissant pas apparaître la traditionnelle cravate, avait aussi valu à l'ex-ministre de la Culture des sarcasmes à l'Assemblée nationale en 1985.

« Travestissement » transgressif

Emprunter au vestiaire du sexe opposé a parfois été périlleux, comme le rappelle une vitrine consacrée à Jeanne d'Arc : l'un des chefs d'accusation lors de son procès était d'avoir porté l'habit d'homme.

Egalement exposée, une ordonnance du préfet de police de Paris de 1800 concernant « le travestissement des femmes » qui leur interdit le port du pantalon, loi finalement abrogée en... 2013. « On avait peur que par le biais du pantalon les femmes prennent le pouvoir », rappelle Denis Bruna.

Corps déformé

Au 14e siècle, le roi Charles V interdit pour ses conseillers le port des « outrageuses poulaines », chaussures dont la pointe était jugée indécente par les moralistes religieux car elle déformait le corps, création de Dieu, et était perçue comme un signe diabolique, explique le commissaire de l'exposition.

La déformation du corps est aussi ce qui a valu des critiques à la griffe japonaise Comme des Garçons, dont les robes du printemps-été 1997 faisaient apparaître d'étranges bosses sur la silhouette.

Trop large, trop moulant

De nouveau en vogue, le vêtement ample a souvent été décrié. Dans une vitrine consacrée au pantalon masculin, des hauts de chausse de 1600 côtoient des pantalons de zazous des années 1940 et des baggys des années 1990. « Les critiques sont toujours les mêmes : on ne voit pas la séparation des jambes, cela entrave la marche », note Denis Bruna. En face est présentée une culotte de peau portée au début du 19e siècle, très moulante, dénoncée comme immorale par les papes Pie VI et Pie VII.

Trop de tissu ou pas assez

En pleine période de rationnement de l'après-guerre, Christian Dior a provoqué la polémique en créant ses silhouettes New Look utilisant une grande quantité de tissu. A la même époque, le bikini fait scandale parce qu'il ne couvre pas assez: il est interdit sur plusieurs plages françaises. Des mannequins refusant de le porter, c'est Micheline Bernardini, une danseuse nue du Casino de Paris, qui le présente à la presse.

Capuche suspecte

La capuche est l'objet de « six siècles de préjugés », souligne Denis Bruna. Une ordonnance de Charles VI interdit le port des « faux visages », capuchons enveloppants que les malfaiteurs peuvent utiliser pour dissimuler leur figure. Comme le sweat à capuche a aussi pu être associé à la délinquance, souligne l'historien.

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