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29 oct. 2008
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Hermès, l'exception boursière du luxe européen

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29 oct. 2008

PARIS (Reuters) - Relativement épargné par la tourmente boursière, Hermès International, dont la valorisation est pourtant unanimement jugée excessive par les analystes, fait figure d'exception dans le paysage du luxe européen.


Pochettes Jige et Jige mini en veau doblis

La valeur qui avait fini, ces dernières semaines, par céder aux coups de boutoir des plongeons répétés de la Bourse et affichait une performance légèrement négative, a opéré un violent rebond mardi provoqué, aux dires des analystes, par des rachats de positions à découvert.

Elle a ainsi fini en hausse de 16,8 % à 96,77 euros mardi, signant une progression de 11,95 % depuis le début de l'année, unique hausse de l'indice SBF120 sur la période, alors que ses concurrents comme LVMH, Richemont ou Burberry accusent des baisses de respectives de 41 %, 35 % et 63 %.

La capitalisation boursière du groupe était de 10,3 milliards d'euros à la clôture du 28 octobre.

A la faveur de spéculations récurrentes sur une évolution de son capital, et malgré les démentis répétés des actionnaires familiaux qui en détiennent 73 %, le titre se traite, en moyenne, trois fois les ratios du secteur du luxe européen, dont la valorisation est revenue aux environs de 10 fois les bénéfices estimés pour 2009.

Pourtant, la majeure partie des analystes ne croient pas à l'attrait spéculatif de la valeur.

"La participation des actionnaires familiaux n'a pas baissé, la société est une commandite et la succession familiale à sa tête semble assurée", soulignent les analystes d'Oddo Securities.


De nombreux héritiers

Ceux de JP Morgan pensent eux aussi qu'Hermès n'est pas à vendre. "La famille a dit, à de nombreuses reprises, son attachement à la société, n'hésitant pas à faire baisser le titre en Bourse, une position peu banale pour qui voudrait vendre".

La nomination, cette année, de six membres de la famille issus de la 6e génération au conseil de gérance a également été interprétée comme le signe d'un engagement fort des descendants du fondateur envers la maison familiale.
Pourtant, le marché n'en démord pas.

"Dans la structure familiale, il faut un leader charismatique, qui ne peut émerger pour l'instant tant l'ombre de Jean-Louis Dumas (l'ancien gérant, membre de la famille Hermès, qui s'est retiré en juin 2007) plane encore sur le groupe", explique un analyste qui a souhaité garder l'anonymat.

Selon lui, l'éparpillement du capital entre les très nombreux héritiers d'Emile Hermès - ils sont environ 60 aujourd'hui - pose un problème de crédibilité au marché.

La maison du Faubourg Saint-Honoré demande d'ailleurs à ses actionnaires, depuis plusieurs années, de pouvoir émettre des bons dits Breton autorisant une société à émettre des bons de souscription en actions pour se défendre en cas d'Offre publique d'achat (OPA).

Une position qu'elle justifie par un principe de "prudence". "Ces bons ne sont pas nécessaires puisque nous sommes une société en commandite et nous sommes acharnés à défendre notre propriété. Cela dit, la prudence reste une seconde nature et nous ne voulons pas injurier le futur, si lointain soit-il", avait déclaré Jérôme Guerrand, président du conseil de surveillance d'Hermès, à l'occasion de l'assemblée générale des actionnaires, en juin dernier.


Carnets de commandes


Hermès profite aussi, selon les experts, de son statut de valeur défensive du luxe. Ce statut provient de son positionnement sur les produits de très haut de gamme, en particulier ses célèbres sacs, "Kelly" ou "Birkin", pour lesquels les listes d'attentes peuvent atteindre plusieurs mois, de son "pricing power" (sa capacité à augmenter les prix) lié à la puissance de sa marque ainsi que de sa relative résistance aux effets de mode, la griffe Hermès véhiculant une image plus classique que d'autres.

"Comme toujours, quand le marché du luxe est en pleine explosion, on trouve que la croissance d'Hermès n'est pas si exceptionnelle. Et en phase de ralentissement, elle apparaît solide", souligne un analyste.

Des carnets de commandes importants sur une partie des activités de maroquinerie du groupe lui permettent en effet de sécuriser une partie de son chiffre d'affaires de l'année suivante.

Un autre analyste estime que dans un contexte de fort ralentissement attendu de la croissance organique du luxe l'an prochain, "les qualités défensives d'Hermès ressortent, tant au niveau de son chiffre d'affaires que de sa position de trésorerie nette".

Le groupe, qui disposait d'une trésorerie nette de 329 millions d'euros à la fin juin 2008, a affirmé à maintes reprises qu'il ne visait pas d'importantes opérations de croissance externe, mais des acquisitions ciblées susceptibles de compléter ses savoir-faire, comme Soficuir, spécialiste de la tannerie, acquis en 2007.

par Pascale Denis
Edité par Jean-Michel Bélot

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